Cent dessins pour habiter le monde

Exposition Habiter le Monde, Villa Dutoit, 2017

Le mot habiter évoque le fait de résider quelque part, d’y avoir une demeure. Pourtant ce n’est pas l’image d’une maison qui s’est imposée à moi. C’est le souvenir d’une photographie : elle montrait un clochard, recroquevillé dans un carton, sur le bord d’un trottoir. Un carton, un abri de fortune qui contraste dramatiquement avec l’idée que l’on se fait d’un habitat, car ici il ne saurait être question d’architecture.

J’imagine que cet homme seul, sous son toit de misère, peut néanmoins habiter le monde à sa manière, et en prendre possession par la pensée. Le carton devient alors une métaphore de l’esprit à l’œuvre. En premier lieu, la réflexion peut porter sur des objets d’habitation et constituer simplement un inventaire de toutes ses formes possibles (cabane des bois, palais des mille et une nuits, roulotte de saltimbanque, etc.), chacune prenant place dans sa boîte. Mais l’imaginaire peut aussi convoquer des façons plus symboliques d’habiter le monde, et les concrétiser par de petites saynètes (le peintre créant son tableau, le jardinier arrosant ses plantations, le marcheur partant à l’aventure, etc.).  

Ainsi, pour moi, « Habiter le monde », c’est constituer une collection foisonnante et hétéroclite, un cabinet de curiosités où chaque carton contiendra un univers miniature et dont l’ensemble formera une composition incohérente-cohérente, faite de choses réelles et irréelles, banales et extraordinaires, de projections mentales, d’élucubrations à la fois singulières et universelles.